Flore pauvre, pauvres de nous !

Source : https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3728647/

Article :

Date de parution : 24.07.2021

Niveau de difficulté : Moyen

Notre flore diges­tive se déter­mine dès notre plus jeune âge, entre trois et dix-huit mois, avant la fina­li­sa­tion des dents, elle est trans­mise par nos parents, notre entou­rage, et notre envi­ron­ne­ment, notam­ment alimentaire. 

La flore s’établie pro­gres­si­ve­ment du haut vers le bas. La flore haute est donc capi­tale, celle de la bouche, qui va influer sur la flore duo­dé­nale et jéjunale. 

Notre tube diges­tif et ses flores sont l’interface entre le monde exté­rieur et notre monde inté­rieur, la bouche en est la porte d’entrée. 

L’intestin repré­sente 80 % de notre immu­ni­té, notre san­té dépend direc­te­ment de notre flore digestive. 

Une flore doit impé­ra­ti­ve­ment être riche, rete­nez sur­tout cela, c’est-à-dire com­po­sée de souches bac­té­riennes variées. 

Plus la varié­té dimi­nue, plus la flore s’appauvrit. 

La flore doit être équi­li­brée, c’est-à-dire que cer­taines familles ne doivent jamais se déve­lop­per au point de pré­do­mi­ner et d’empiéter sur le ter­ri­toire d’autres familles, au risque de les faire dis­pa­raître, ou presque. 

Une flore pauvre, c’est une famille de bac­té­ries qui a pris le pou­voir sur les autres, et dont la popu­la­tion aug­mente de façon anor­male et conséquente. 

Une flore pauvre, c’est une dys­biose, une pul­lu­la­tion bactérienne. 

Les deux grandes familles de la flore diges­tive humaine sont les bac­te­roïdes et les fir­mi­cutes, puis viennent les acti­no­bac­te­ria et enfin les proteobacteria. 

Afin d’éviter toute pro­li­fé­ra­tion patho­lo­gique, notre diges­tion doit être rapide avec un bon nerf vague assu­rant un flux suffisant. 

Les bac­té­ries patho­gènes se déve­loppent natu­rel­le­ment dans les eaux stag­nantes, pas dans les eaux vives. 

Lorsque le flux fait défaut, le risque de stases et de reflux aug­mentent, favo­ri­sant la pro­li­fé­ra­tion bac­té­rienne et l’envahissement du ter­ri­toire (les voies biliaires, le pan­créas, et les autres organes, cer­veau ou peau). 

Les ali­ments que nous ingé­rons ont une réper­cus­sion déter­mi­nante sur notre flore, car ils sti­mulent et nour­rissent les bac­té­ries intestinales. 

Nous sommes l’intendance des armées qui com­battent dans une véri­table guerre des mondes qui se déroule dans notre tube digestif. 

Malheureusement, l’alimentation moderne trop riche en sucres fer­men­tes­cibles (farines, céréales, fibres, glu­cose, fruc­tose) appau­vrit notre flore diges­tive depuis quelques décen­nies, c’est-à-dire qu’elle pri­vi­lé­gie la pul­lu­la­tion de cer­taines familles bac­té­riennes au détri­ment d’autres familles, et ins­talle un bio­film patho­gène, dété­riore nos muqueuses, nuit au nerf vague, affai­blit gra­ve­ment notre immu­ni­té, et détruit la sym­biose interne indis­pen­sable à notre santé. 

Les trai­te­ments anti­bio­tiques et de nom­breux autres médi­ca­tions sont rava­geurs, ils détruisent la flore et agressent la muqueuse. 

Dans l’intestin grêle, où se situe la flore déter­mi­nante de notre immu­ni­té, les bac­té­ries traitent nos ali­ments par fer­men­ta­tion et émettent dif­fé­rents gaz qui sont en grande par­tie trans­por­tés aux pou­mons par la cir­cu­la­tion san­guine et exha­lés lors de l’expiration. 

L’analyse des gaz res­pi­ra­toires nous per­met d’évaluer notre flore avec une grande précision. 

La flore intes­ti­nale humaine peut être clas­si­fiée en trois caté­go­rie, trois entérotypes.

Entérotype 1 : Bacteroïdes

C’est la flore qu’il faut avoir ou vers laquelle il faut tendre. C’est une flore plu­tôt riche, avec pré­sence d’hydrogène, d’hydrogène sul­fu­reux et d’oxyde nitrique (NO). 

L’hydrogène est un gaz impor­tant, il doit être pré­sent, mais en quan­ti­té phy­sio­lo­gique, c’est-à-dire qu’il ne doit pas être trop pré­sent non plus, ce qui serait le signe d’une fer­men­ta­tion exces­sive, donc d’une pul­lu­la­tion de la flore de fer­men­ta­tion, nour­rie par une inges­tion exces­sive de sucres. 

Trop d’hydrogène se tra­duit pas des bal­lon­ne­ments par­fois douloureux.

L’hydrogène ne doit jamais être pré­sent à jeun (maxi­mum 4 ppm), ce qui serait le mar­queur d’une muqueuse en souf­france, dégra­dée par des bac­té­ries, virus, myco­toxines, ou des pro­duits et com­po­sés chi­miques (ex : Roaccutane, huiles essen­tielles, argent colloïdal…). 

Mais ce gaz doit être pré­sent modé­ré­ment après inges­tion de sucres.

L’hydrogène sul­fu­reux est l’indicateur d’une flore riche. Il faut abso­lu­ment avoir ou retrou­ver de l’hydrogène sul­fu­reux, c’est un gaz for­te­ment neuro-protecteur. 

Mais plus encore que pour l’hydrogène, la four­chette phy­sio­lo­gique est res­treinte : trop peu ou pas du tout est la marque d’une flore pauvre. Trop éle­vé, il est la marque d’une flore très agres­sive, com­po­sée de bac­té­ries muci­no­phages des­truc­trices, ce qu’il faut évi­ter à tout prix. 

Le NO gazeux est quand à lui capi­tal, signe d’une flore haute aéro­bie (bouche, esto­mac, duo­dé­num), riche, très pro­tec­trice contre l’entrée des virus dans la sphère ORL.

La pan­dé­mie de Covid-19 est l’expression dra­ma­tique de l’expansion d’une flore pauvre au sein de la popu­la­tion, de troubles immu­ni­taires induits, et sur­tout d’une grave carence en NO de la sphère ORL (je le constate dans les mesures que j’effectue lors de mes consul­ta­tions en nutri­tion avec mesure des gaz respiratoires). 

La flore colique est inin­té­res­sante, seule la pré­sence d’Akkermensia est un mar­queur d’une flore riche. Sa pré­sence est rassurante. 

Entérotype 2 : Prevotella

C’est une flore très agres­sive lorsqu’elle est trop domi­nante, sou­vent asso­ciée à des bac­té­ries qui découpent les tis­sus comme desul­fo­vi­brio, pro­pio­ni­bac­te­rium, por­phy­ro­mo­nas, et fuso­bac­te­rium. Helicobacter Pylori est sou­vent pré­sent avec cette clique de fous furieux. 

Cette flore est faci­le­ment visible dans la bouche. 

Trop de Prevotella dans le grêle est catastrophique.

C’est la flore de la RCH (rec­to­co­lite hémor­ra­gique ) par excel­lence, du can­cer du colon droit, et de l’atteinte biliaire en rai­son d’une forte décon­ju­gai­son des sels biliaires pri­maires, et donc la pro­duc­tion de sels secon­daires très cor­ro­sifs, avec en prime une inva­sion des organes par les bac­té­ries muci­no­phages en rai­son de dif­fé­rents reflux (cal­culs biliaires, pan­créa­tite, endo­mé­triose, fibro­my­al­gia, thy­roï­dite, etc.)

Le NO est peu pré­sent avec une flore Prevotella, en rai­son d’une flore haute anaé­ro­bie très marquée. 

Les virus rentrent faci­le­ment, notam­ment la grande famille for­te­ment immu­no­sup­pres­sive des Herpès virus. Lorsque le Sars-Cov‑2 arrive sur ce ter­rain, la porte lui est grande ouverte. 

La flore pre­vo­tel­la est en fait une flore anti-NO, celle de l’acné, des caries den­taires et des mala­dies paro­don­tales, du ter­rain aller­gique, pso­ria­sique et tumoral. 

La flore est éga­le­ment virale, nous venons de le voir avec les her­pès virus, mais éga­le­ment de nom­breuses autres familles comme les enté­ro­vi­rus, rhi­no­vi­rus, etc. 

En pré­sence d’Epstein-Barr, un Herpès virus, une flore pre­vo­tel­la mar­quée peut faire des ravages. 

Le gaz méthy­la­cé­tate est ici sou­vent éle­vé, signe d’une alté­ra­tion de la muqueuse intes­ti­nale avec malabsorption. 

Enterotype 3 : Ruminococcus.

C’est la flore métha­no­gène, celle de la consti­pa­tion, cor­ré­lée à la dépres­sion, avec une forte pré­sence de fir­mi­cutes, clos­tri­dia et blautia.

La consti­pa­tion existe avec les autres flores éga­le­ment, mais pour d’autres rai­sons qu’une pro­duc­tion exces­sive de méthane, comme le SIBO, la lithiase biliaire, l’hy­po­to­nie vagale, la sur­pro­duc­tion de sels biliaires secon­daires, etc. 

La flore métha­no­gène existe chez 30 à 50% de la popu­la­tion, chez 20% des per­sonnes obèses, elle se situe dans le colon gauche. 

Lorsque que les bac­té­ries métha­no­gènes pul­lulent, la fer­men­ta­tion devient per­ma­nente et gagne l’en­semble du colon. La consti­pa­tion et les symp­tômes dépres­sifs appa­raissent ou s’ag­gravent, avec un risque de reflux colo-iléal, phé­no­mène tota­le­ment « inter­dit ». Les flores ne doivent pas enva­hir des ter­ri­toires qui ne sont pas les leurs. 

Flore hydro­gène et métha­no­gène sont incom­pa­tibles, La flore métha­no­gène étant hydrogénotrophe.

L’hydrogène est donc très peu pré­sent en rai­son du méthane concur­rent, l’hydrogène sul­fu­reux absent. 

Nous ne pou­vons pas chan­ger de flore, mais nous pou­vons faci­le­ment cor­ri­ger une flore déré­glée, source de nos mala­dies, et jouir d’une excel­lente san­té quel que soit notre entérotype.

Il suf­fit pour cela d’éviter l’appauvrissement, donc les pul­lu­la­tions et les gaz trop impor­tants, de gar­der le contrôle des virus neu­ro­tropes, et de conser­ver l’intégrité du nerf vague. 

Précisons au pas­sage que le nerf vague est alté­ré par les flores pauvres, les biol­films agres­sifs, les virus et l’inflammation digestives. 

Grace à la mesure des gaz res­pi­ra­toires, il est pos­sible de déce­ler les dif­fé­rentes dys­bioses (pul­lu­la­tion de la flore de fer­men­ta­tion – flore pauvre), et de cor­ri­ger avec précision. 

Agir à l’aveugle ne fait bien sou­vent qu’empirer les choses, ce qui est très sou­vent le cas avec les probiotiques :

Vous avez des gaz ? Probiotiques ! Vous avez des incon­forts diges­tifs, des dou­leurs ? Probiotiques ! Vous êtes consti­pé ? Probiotiques !

Mais si vous don­nez, par exemple, des pro­bio­tiques à une per­sonne en sur­poids, avec un mésen­tère gras et beau­coup d’hydrogène, vous l’envoyez à la catas­trophe. Vous ajou­tez des mil­liards de bac­té­ries là où il y en a déjà beau­coup trop. Vous appau­vris­sez la flore !

Les pro­bio­tiques mul­ti­plient par trois le pro­duc­tion d’hydrogène, favo­risent le sur­poids, décon­jugent en masse les sels biliaires pri­maires, aug­mentent dra­ma­ti­que­ment la pro­duc­tion de buty­rate, et mènent à un ter­rain tumo­ral par aug­men­ta­tion des T. régu­la­teurs (tout cela est docu­men­té et publié). 

Les pro­bio­tiques ne sti­mulent pas le nerf vague, ne le pro­tègent pas, ne cor­rigent pas la flore, ils n’en ont pas le pou­voir, mais l’appauvrissent davan­tage, et ils n’augmentent en aucun cas la pro­duc­tion de NO (signe d’une flore riche et d’un bon nerf vague) !

Prescrire des pro­bio­tiques à l’aveugle est tota­le­ment irresponsable !

Il faut enri­chir une flore, et non l’appauvrir davan­tage, ni la détruire à coup d’antibiotiques. 

On n’enrichit pas en détruisant !

Le méthy­la­cé­tate est un gaz très inté­res­sant qui exprime beau­coup de choses : 

Lorsqu’il est peu pré­sent, la flore est extrê­me­ment pauvre, une flore par­ti­cu­lière qui fait du gras avec tous les sucres ingé­rés, même une salade verte ou autres cru­di­tés (les fibres sont des sucres). 

Dans ce contexte, peu importe les calo­ries et l’activité phy­sique, cette flore fait du gras, un point c’est tout, et cela au grand déses­poir des per­sonnes concer­nées, et des thé­ra­peutes qui ne pensent qu’aux calo­ries dans la ges­tion du poids.

Lorsqu’il est trop pré­sent, c’est éga­le­ment une flore pauvre, avec un intes­tin abî­mé qui souffre, c’est la malab­sorp­tion, le bon­heur des bac­té­ries qui se régalent de vos repas. Cette flore fait éga­le­ment du gras par fer­men­ta­tion des sucres et pro­duc­tion de graisse viscérales. 

Je ne vais pas détailler ici toutes les dys­bioses pos­sibles, mais pré­ci­ser que leur source est com­mune : les sucres fer­men­tes­cibles qui nour­rissent et font pul­lu­ler des familles de bac­té­ries (myco­bac­te­rium, pre­vo­tel­la, aci­ne­to­bac­ter …) qui prennent le pou­voir au détri­ment des autres familles plus vulnérables. 

Je le répète, notre ali­men­ta­tion moderne est beau­coup trop riche en sucres (farines, céréales, fruc­tose, fibres). On nous demande de man­ger des fécu­lents à chaque repas et de consom­mer des en-cas !

Ce que l’intestin peut sup­por­ter à 20 ans, lui nuit for­te­ment à 40. 

La dys­biose touche 80% des plus 40 ans, et sou­vent bien avant. 

Les consom­ma­teurs régu­liers de sucres, atteints d’une dys­biose, peuvent dif­fi­ci­le­ment res­ter actifs plus de quelques heures sans devoir ingé­rer à nou­veau des sucres. Sans sucres, ils se trouvent rapi­de­ment en panne d’énergie, car ils n’ont plus accès à une autre source éner­gé­tique inté­res­sante : la graisse corporelle ! 

Le sur­poids, l’obésité, le dia­bète, les mala­dies auto-immunes, les can­cers, les mala­dies cardio-vasculaires, explosent. Les cabi­nets médi­caux sont bon­dés. Les intes­tins souffrent, et les patients crient leurs malheurs. 

Il convient donc de sor­tir de cette inep­tie nutri­tion­nelle, de réduire dras­ti­que­ment les sucres fer­men­tes­cibles et de réin­tro­duire un biote concur­rent, tel­lu­rique, riche en bac­té­ries aéro­bies, celles qui pro­duisent du NO

Privilégiez les légumes à feuilles vertes, blanchissez-les, cuisez-les et associez-les à de bonnes graisses ali­men­taires natu­relles : viandes grasses, pois­sons gras, fro­mages affi­nés plus de six mois, oeufs. 

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3728647/

A peu de sucres, bon biote !