Nitrates, nitrites, éléments toxiques ?
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Date de parution : 18.07.2019
Niveau de difficulté : Moyen
Nitrates et nitrites, voici deux mots qui effraient la population tant elle a lu et entendu les terribles méfaits de ces « poisons » sur la santé des mangeurs de cochonnailles et sur l’environnement. Les nitrates et les nitrites seraient cancérigènes.
Pourtant, les nitrates et les nitrites sont des molécules naturelles omniprésentes, notre environnement en contient parfois dans de grandes proportions sans aucune intervention de l’homme : l’air, l’eau, le sol, les végétaux et les animaux, impossible d’y échapper.
Je ne vois dès lors que deux solutions :
- Soit nous arrêtons immédiatement, pour notre santé, de respirer (par précaution, bien que l’air représente un apport négligeable), de boire, de manger des végétaux parce qu’ils en regorgent, d’avaler notre salive qui toute notre vie recycle sans cesse de grandes quantités de nitrates qui se transforment en nitrites dans notre bouche, et d’autoriser les mères à nourrir leurs enfants de leur lait « empoisonné », aliment le plus riche en nitrites.
- Soit nous nous posons ces questions afin de nous orienter vers une réflexion intelligente : pourquoi Mère nature a‑t-elle placé partout sur Terre ces deux nutriments ? Est-ce une erreur de sa part ? Nous veut-elle du mal ?
La réponse est que la nature ne se trompe pas, si ces molécules existent c’est qu’elles sont d’une importance majeure à la vie, l’évolution, et la santé sur Terre !
Les anciens ne se trompaient pas non plus, en répandant du fumier dans leur jardin, ils savaient par expérience que leurs légumes seraient plus beaux. Nous savons aujourd’hui que le fumier est riche en nitrates, et que cela aide les plantes à pousser.
Depuis des milliers d’années les hommes conservent, à défaut de réfrigération, les viandes avec du sel et du salpêtre (nitrate de potassium). Les bactéries transforment le nitrate en nitrite qui devient alors un agent conservateur très efficace et qui préserve les viandes des bactéries particulièrement nocives comme Clostridium botulinium et Listeria monocytogenes.
Incriminer le jambon pour son apport en nitrites est ridicule, car les légumes représentent 85% de nos apports en nitrates et nitrites, les viandes de salaison (charcuteries) n’en représentent que 10%. Lorsque nous consommons du jambon accompagné d’épinards, ces derniers apportent beaucoup plus de nitrates et de nitrites que la viande pestiférée. Il règne dans le domaine de la nutrition une hypocrisie éhontée qui sert des croyances absconses et une idéologie dogmatique qui désinforment le consommateur.
Il y a encore peu de temps, certains scientifiques accusaient les nitrites de produire des N‑nitrosamines dans l’estomac au contact des protéines alimentaires et d’être à cette condition cancérigènes, mais les études récentes approfondies ont complétement disculpé les nitrites. En effet, la formation de N‑nitrosamines dans l’estomac est loin d’être automatique, en fonction de l’acidité et de la présence de vitamine C, et les viandes ne contiennent que peu d’amines primaires susceptibles de produire des N‑nitrosamines (sauf si vous carbonisez votre viande au lieu de la cuire raisonnablement).
Les N‑nitrosamines cancérigènes (plus de 300 composés différents) sont surtout apportées par la consommation de tabac, de médicaments, de produits cosmétiques, de produits chimiques agricoles, et par les expositions industrielles.
En quarante années d’intenses investigations, il y a très peu d’évidence directe de l’effet cancérigène des nitrates et nitrites, et aucun lien véritable de causation n’a pu être démontré.
Accuser les viandes d’être cancérigènes en raison d’une production de N‑nitrosamines et plébisciter les légumes, les légumineuses et les céréales, n’a aucun sens. Les végétaux apportent également, en plus d’une grande quantité de nitrates et de nitrites, des protéines. De plus, les quantités importantes de végétaux nécessaires pour couvrir les besoins en protéines (si l’on est végétalien) aggraveraient le problème par les apports massifs de nitrates et nitrites.
Dit-on des brocolis, des haricots secs, du blé et du quinoa qu’ils sont cancérigènes ? Je ne le pense pas !
L’homme consomme de la viande depuis qu’il est homme, comment aurait-il survécu presque trois millions d’années ? Nous-mêmes, Homo Sapiens, ayant profité de l’expérience de nos prédécesseurs, nous cuisons la viande depuis notre apparition, soit environ 300 000 ans !
Si les nitrates, nitrites étaient cancérigènes, que feraient-il dans le lait maternel, de surcroît riche en protéines ? Comment font les bébés, organismes faibles sur le plan immunitaire par définition, pour survivre ainsi depuis la nuit des temps et perpétuer l’espèce malgré tout ?
En fait, les nitrates et les nitrites participent à l’immunité des bébés en les protégeant des bactéries pathogènes.
Aujourd’hui, des traitements à base de nitrates sont envisagés pour lutter contre les infections buccales et gastro-intestinales, et les apports de nitrates alimentaires sont corrélés à une diminution du risque d’apparition du cancer de l’estomac.
Les nitrates et les nitrites sont les meilleurs alliés de notre cœur !
Le voici, le principal effet des nitrates et nitrites, en plus d’être immunostimulants, ils sont protecteurs indispensables du système cardiovasculaire.
Les nitrates apportés par l’alimentation, en plus d’un à deux litres de salive journalière, se transforment en partie en nitrites dans notre bouche au contact de la flore bactérienne, participant ainsi au maintien d’une indispensable hygiène buccale (lutte conte les bactéries, champignons et protozoaires indésirables), puis se transforment en oxyde nitrique (NO) dans l’estomac, un gaz qui signale aux vaisseaux sanguin de se dilater afin de conserver un afflux sanguin et apport d’oxygène adéquat. Sans production suffisante de NO, l’attaque cardiaque et l’accident vasculaire cérébral guettent.
L’effet vasodilatateur débute dès l’estomac en augmentant le flux sanguin de la muqueuse gastrique, permettant ainsi une meilleure défense contre les invasions pathogènes diverses.
La production de NO est indispensable à une bonne régulation de la pression artérielle et un apport sanguin optimal à tous les organes.
Les sportifs connaissent très bien la nécessité d’une production importante de NO pour alimenter les muscles en oxygène et en nutriments, tout en les débarrassant des déchets métaboliques, ainsi que les personnes en défaut d’érection, consommateurs de petites pilules bleues qui permettent d’augmenter artificiellement la production de NO.
Nitrates, nitrites et NO, permettent de conserver les artère jeunes et flexibles, préviennent la formation de plaques d’athérome, protègent des maladies cardiovasculaires et de multiples autres maladies chroniques.
Les Tibétains ont, en raison de l’altitude, des taux 100 fois plus élevés en nitrates et nitrites que les personnes vivant au niveau de la mer. Leur organisme conserve et recycle davantage ces deux éléments précurseurs de NO afin de garantir un apport d’oxygène suffisant aux cellules. Si les nitrates et les nitrites étaient cancérigènes, il n’existerait plus de Tibétains depuis longtemps.
Au sujet de la méthémoglobinémie ou du syndrome du bébé bleu :
Il s’agit d’une maladie qui touche parfois les enfants de moins de six mois chez qui les nitrites oxydent le fer transporté par l’hémoglobine et prive ainsi les tissus d’oxygène, leur donnant un teint bleuâtre. Les nitrites ont longtemps été désignés coupables de cette maladie, et les apports devaient être surveillés de près, mais aujourd’hui, les nitrites sont ici aussi disculpés, et les causes mises en avant sont des infections bactériennes de l’estomac (gastroentérites) et des invasions bactériennes aboutissant à une surproduction de nitrites et NO.
Au sujet de l’environnement :
Les nitrates sont accusés de tuer les poissons des rivières et d’induire une prolifération d’algues vertes sur nos plages. Mais encore une fois, ce ne sont pas les nitrates qui tuent directement les poissons, mais la prolifération d’algues dopées par les nitrates issus d’une exploitation agricole démesurée qui surexploite les engrais chimiques. Les nitrates des champs, sous l’effet des pluies, se retrouvent dans les cours d’eau et les rivières où ils aident les algues à prospérer, et comme les algues puisent l’oxygène pour vivre, les poissons meurent par anoxie (absence d’oxygène). Les rivières allant vers les estuaires et la mer, les algues y prolifèrent aisément et envahissent l’environnement côtier. La nature n’avait pas prévu ces concentrations phénoménales de nitrates dans l’environnement, c’est l’homme contre-nature et sa puissante chimie qui est responsable des déséquilibres constatés ces dernières décennies.
A craindre les conservateurs naturels comme le sel, les nitrates et les nitrites, la contamination bactérienne des viandes de charcuterie et des fromages risque de poser un véritable problème de santé publique, ce contre quoi les industriels se protégeront en utilisant des agents conservateurs réellement nocifs.
L’homme est intelligent mais malheureusement sujet à des croyances irraisonnées et enclin aux réflexions débiles (ici dans le sens de faible, sans puissance).
Bon jambon !
https://www.cambridge.org/core/services/aop-cambridge-core/content/view/S000711459900063X
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4690057/
The Nitric Oxide (NO) solution. Pr Nathan S.Bryan, Dr Janet Zand.