Le Nutella, un véritable danger !
Source : www.meltyfood.fr
Article : Le 5 février, c'est le World Nutella Day !
Date de parution : 21.02.2013
Niveau de difficulté : Moyen
http://www.meltyfood.fr/le-5-fevrier-c-est-le-world-nutella-day-a155518.html
Alors, est-ce une hérésie de fêter un aliment jugé trop gras, d’autant qu’il s’agit d’un gras supposé mauvais ? Nous allons essayer de répondre à cette question à travers « l’affaire Nutella » :
Fin 2012, la commission des Affaires Sociales du Sénat voulait adopter un « amendement Nutella » au projet du budget de la Sécurité Sociale afin de taxer de 300% l’huile de palme, une huile omniprésente dans l’industrie alimentaire et considérée comme néfaste pour la santé. L’initiateur de ce projet était le sénateur Yves Daudigny qui précisait que cette taxe devait constituer un signal « non à destination des consommateurs, mais à destination des industries agro-alimentaires pour qu’elles substituent à ces huiles de nouvelles compositions plus respectueuses de la santé humaine ». Mais, je me pose la question suivante : que sait précisément Mr Daudigny des huiles respectueuses de la santé humaine, et que sait-il réellement de l’huile de palme ?
Rien d’autre apparemment que les fausses allégations lancées et développées par les lobbies agro-alimentaires, dans les années 1960 aux Etats-Unis, qui souhaitaient développer le marché des huiles végétales dites « polyinsaturées », l’huile de soja en tête de liste. Pour cela il leur fallait détruire la réputation des graisses végétales dites « saturées », comme l’huile de palme, de palmiste et de coprah, auprès du public et des professionnels de la santé ; une désinformation organisée et tellement répandue qu’elle est aujourd’hui bien acquise et considérée comme vérité absolue par tous (ou presque !).
Je souhaiterais, à l’occasion de ce « Nutella Day », rétablir en quelques lignes la vérité sur les graisses saturées de l’huile de palme qui, soi-disant, « contribuent au développement de l’obésité et favorisent les maladies cardio-vasculaires » :
- L’huile de palme est confectionnée à partir des fruits du palmier à huile. Cette huile naturellement très colorée et extrêmement riche en antioxydants a été utilisée par de nombreuses populations pendant plus de cinq mille ans dans différentes parties du monde et a admirablement contribué au bon maintien de leur santé.
- L’huile de palme est solide à température ambiante, elle est très stable, ne rancit pas facilement, et supporte parfaitement les hautes températures. Ce sont ces qualités naturelles qui lui confèrent l’intérêt de l’industrie alimentaire (en dehors de sa bonne rentabilité financière).
- L’huile de palme contient des graisses saturées[1] diabolisées à tort, ce que les études scientifiques indépendantes[2] tentent de démontrer ces dernières années en prouvant clairement leurs vertus et en démontrant que les graisses naturelles saturées ne sont pas responsables des maladies cardio-vasculaires. Le principal coupable serait en vérité, la surconsommation de sucres rapidement assimilés par l’organisme, qui induit un taux d’insuline dans le sang chroniquement élevé. Les pics glycémiques[3] successifs créeraient avec le temps, une inflammation très pernicieuse des parois de nos vaisseaux sanguins, créant un état propice à l’athérosclérose[4] et aux rétrécissements des artères. Mais les « vérités » établies semblent avoir la peau dure. On se trompe de cible, ce qui est dangereux pour la santé, ce n’est pas l’huile de palme du Nutella, mais le sucre qu’il contient (55% du produit) et le pain blanc sur lequel il est étalé, tous deux des sucres rapides, alors gare aux quantités absorbées !
Il existe cependant une condition pour laquelle l’huile de palme est dangereuse : lorsqu’elle est modifiée par l’industrie alimentaire afin de la rendre encore plus « saturée », plus solide et plus stable. Cette manipulation humaine crée des graisses « hydrogénées » ou « Trans », véritables « poisons » pour l’organisme, qui sont depuis plusieurs décennies les véritables responsables (avec les sucres rapides et l’insuline en excès) du surpoids, de l’obésité et des maladies cardio-vasculaires.
Les graisses Trans n’entrent plus aujourd’hui dans la composition du Nutella, l’huile de palme utilisée dans ce produit est donc sans danger pour la santé.
Il me faut maintenant dire quelques mots sur les « huiles de nouvelles compositions plus respectueuses de la santé humaine », si chères aux yeux de notre humaniste Mr Daudigny. Sont-elles vraiment si respectueuses ?
Non, car :
- L’industrie alimentaire a besoin, pour diverses raisons organoleptiques (goût, texture, consistance, maintien,…) d’une matière grasse solide plutôt que liquide, donc de graisses alimentaires et non d’huiles ; imaginez vos biscuits favoris suintant l’huile à température ambiante ! Si l’huile de palme, ou plus justement la graisse naturelle de palme, est bannie des recettes industrielles, elle sera, en Europe, très probablement[5] remplacée par de l’huile de tournesol et éventuellement par de l’huile de colza, deux huiles parfaitement liquides qu’il va falloir rendre plus solides. Pour cela l’industrie alimentaire sera tentée de recourir au procédé d’ « hydrogénisation », peu coûteux, mais générateur des graisses « Trans » très délétères dont je vous ai parlé un peu plus haut.
- Ces huiles de tournesol et de colza sont des huiles fragiles, peu stables, qui rancissent vite lorsqu’elles sont naturelles. Pour pallier à ce problème (en partie), elles sont ultra raffinées, donc dénaturées, et perdent alors tout intérêt nutritionnel.
- L’huile de tournesol est une huile riche en Omega6 et aggrave le rapport Omega6/Omega3 déjà désastreux de l’alimentation moderne et qui est responsable de nombreux maux d’aujourd’hui comme un état inflammatoire chronique responsable de nombreux troubles cardio-vasculaires, notamment la formation de plaques d’athérome !
- Même si l’huile vierge de colza est une huile naturellement riche en Omega3 et serait pour cela bienvenue pour améliorer le rapport Omega6/Omega3 de notre alimentation, cette huile est extrêmement fragile. Pour résoudre ce problème l’industrie alimentaire a créé, tout en conservant l’image « colza=Omega3 », une nouvelle variété de colza plus résistante à la chaleur, mais pour cela enrichie en Omega6 et très appauvrie en Omega3 !
- Si la législation française n’oblige toujours pas les industriels à stipuler sur les emballages les motions « graisses Trans », « graisses hydrogénées » ou « graisses partiellement hydrogénées », les soi-disant « huiles plus respectueuses » seront toujours Trans-formées et donc nocives pour la santé. Au final le résultat sera pire, on passera d’une huile de palme saine, à une autre huile végétale, moins nutritive et hydrogénée.
Au vu de tout cela, je ne suis donc pas sûr que sur le plan santé le mal décrié existe réellement et je suis encore moins sûr que le traitement proposé soit, au final, plus sain que le mal supposé.
Alors quelle serait la solution parfaite ?
Eh bien, il faudrait tout simplement s’assurer que l’huile de palme utilisée soit une huile de palme naturelle et non hydrogénée, une huile de palme moins raffinée qu’elle ne l’est actuellement afin qu’elle conserve ses qualités nutritives et antioxydantes.
Mieux encore, il faudrait la remplacer par de l’huile vierge biologique de palmiste ou de coprah (issues respectivement du noyau du fruit du palmier et de la noix de coco) car ces graisses saturées (solides à l’état naturel) sont de véritables trésors de bienfaits en raison de leur haute teneur en acide laurique, ce même acide gras que l’on trouve dans le lait maternel et qui assure l’immunité intestinale des bébés ; une graisse naturellement antibactérienne, antibiotique et antifongique ; une graisse qui ne se stocke pas car directement utilisée par l’organisme pour fournir de l’énergie ; une graisse qui augmente le métabolisme et qui aide donc à perdre du poids !
Les graisses naturelles saturées, beurre et graisses animales compris, ne sont donc pas les graisses que l’on nous dit être mauvaises depuis des décennies, il est grand temps de les réhabiliter. Les graisses dites « polyinsaturées », celles jugées bonnes pour la santé et « respectueuses de la santé humaine » le sont effectivement, mais à condition de ne pas déstabiliser le bon rapport Oméga3/Oméga6, et à condition d’être consommées vierges et bio, de préférence à basses températures et non manipulées par l’industrie alimentaire.
Je n’aborderai pas ici le problème environnemental actuel de la culture massive des palmiers à huile et de la déforestation en Malaisie ou en Indonésie, car cela sort de mon domaine de compétence, et qu’une culture équitable et responsable dans ce domaine est tout à fait possible, que des efforts sont actuellement entrepris par certaines grandes enseignes[6] qui tiennent à leur image de marque, et qu’il revient aux politiques d’agir dans ce sens.
Pour finir, un mot sur l’hypocrisie politicienne : si le Sénat pensait réellement œuvrer pour la santé des citoyens, il ferait tout ce qui est en son pouvoir pour interdire un produit qu’il juge dangereux ; il ne se contenterait pas d’étudier une éventuelle taxe de 300%, qui comme l’espérait Mr Daudigny, aurait rapporté 40 millions d’Euros par an à l’Etat.
N’y a t‑il pas quelque chose d’incroyablement cupide à vouloir spéculer sur un produit « néfaste », sachant pertinemment que ce « message envoyé aux industriels » sera inopérant et qu’au final ce sera le consommateur qui paiera la note en supportant l’augmentation de ses produits favoris, et l’Etat qui se remplira les poches ?
En plus d’être ignorants, certains font preuve de cynisme !
Mais l’amendement a finalement été rejeté en commission par l’assemblée et il faudra attendre l’examen du budget 2013 pour connaître la suite de l’épisode.Quoi qu’il en soit, ne privez pas vos enfants, à l’occasion, d’une bonne couche de leur pâte à tartiner préférée sur une tranche de pain complet bio, au levain, à l’heure du goûter, et trempez votre doigt dans le pot au passage si le cœur vous en dit !
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[1] Know Your Fats : The Complete Primer for Understanding the Nutrition of Fats, Oils and Cholesterol. Mary G.Enig.
[2] Ex : – http://www.i‑dietetique.com/articles/acides-gras-satures-vers-une-rehabilitation-mondiale/8287.html – Caloric Sweetener Consumption and Dyslipidemia Among US Adults. JAMA. 2010;303(15):1490 – 1497. doi:10.1001/jama.2010.449
[3] Niveau élevé de sucre dans le sang.
[4] L’athérosclérose se définit comme un dépôt progressif de graisses, liée à certains autres métabolites comme le calcium, sur les parois internes des artères et pouvant mener à leur obstruction partielle ou totale.
[5] Le beurre remplacerait à merveille l’huile de palme, mais sa richesse naturelle en graisses saturées lui donne mauvaise presse.
[6] Enseignes qui participe au RSPO (Roundtable on Sustainable Palm Oil) comme Bjorg ou Nestlé. Notons toutefois que bien des efforts sont encore à accomplir pour l’avènement d’une production équitable généralisée de l’huile de palme.